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Une revue : 'Le Scooter' / Un scooter : le D.R. 1953

Au début des années 50, la déferlante scootériste entraîna aux Editions Lacôme dont le fleuron était Moto Revue la création de revues spécialisées : Scooter & Cyclomoto décliné ensuite en Scooter Magazine et Cyclomoto Magazine, pendant que la maison d'en face, prenant le train en marche passait de Motocycles à Motocycles et Scooters. Un autre titre, plus modeste, se fit une place en mai 1952 à côté de ces poids lourds (!) de la Presse. Il s'intitulait simplement Le Scooter et se maintint durant 78 numéros mensuels. Son directeur, J. Lacroix était seul maître à bord, comme Max Enders l'était à Motocycles ou Camille Lacôme à Moto Revue, seul avec cette particularité qu'il était dans les débuts vraiment seul à fabriquer sa revue. Plus tard quelques audacieux pigistes viendront lui donner un coup de main. Audacieux car ils étaient salariés des revues concurrentes... (Tano-André Nebout à Motocycles ou, côté Moto Revue, R.V. puis Hervé, deux pseudos de René Vaÿsse).  

À en juger par la rareté des exemplaires de Le Scooter rencontrés aujourd'hui sur le marché de la brocante/bouquinistes, la diffusion de cette revue était faible par rapport à celle de ses concurrentes. Cependant l'affaire fut rentable, assez pour avoir vécu jusqu'à l'agonie du deux-roues français.

La politique éditoriale de J. Lacroix était motivée par deux constatations : 1° Le scooter s'adresse pour une part à une clientèle féminine et jeune, qu'elle soit aux commandes - rare - ou passagère - souvent. 2° Le scooter est un engin convivial engendrant des  clubs spécifiques à travers le pays. Donc, pour les demoiselles, il y aura des rubriques de mode avec textes et photos fournis par les firmes de prêt-à-porter, donc gratuits; des conseils de maquillage (contre le vent, le froid, la pluie); les nouveautés en équipements spécifiques tels que casques, lunettes, etc, où l'élégance importe plus que la sécurité. Chaque fois que c'est possible, une femme sur un scooter sont en couverture de la revue, sans qu'il y ait toujours dans les pages intérieures un article en rapport avec la machine présentée. Dans le même esprit figurent des encarts publicitaires qu'on ne retrouve pas chez les concurrents : ceinture élastique de maintien Sporflex-Centauro ; foulard "Scooter", dentifrice Chlorophylor qui blanchit les dents, cours de danse Seul chez vous (?) ou dans notre studio. Un 1/4 de page de la revue Guérir annonçait un article sur L'harmonie du couple (Guérir est à la même adresse que Le Scooter). L'autre lectorat ciblé par la revue est celui des adhérents aux clubs scootéristes qui ont poussé comme des champignons. On leur fait une large place, souvent sur de pleines pages avec photos, là encore fournies par les clubs. Qu'il s'agisse d'un rallye, de l'élection d'un nouveau bureau, de l'élection de "Miss Quelque chose", d'un gymkhana, d'un concours d'élégance, ce que d'aucuns, pour faire d'jeune appellent aujourd'hui "concours de look" (alors qu'il n'a pas échappé à ces ploucs d'Américains que le "concours d'élégance" est bien plus... élégant que le "look" étasunien), toute cette activité remplit des pages et des pages. Gratuitement toujours puisque ce matériel est fourni par les clubs.

Comme chez ses concurrents, Le Scooter présente des essais de machines ainsi que quelques articles de vulgarisation (code de la route, préparation aux vacances, aux voyages, etc). Une orientation plus technique apparut lorsque la revue passa aux Editions Lajeunesse, éditeurs de Motocycles. C'est tout naturellement que André Nebout, journaliste à Motocycles devint officiellement en 1955 rédacteur en chef de Le Scooter. Son influence "motocycliste" se fit rapidement sentir par la publication de sujets encore jamais traités : compte-rendus sur le Bol d'or (catégories scooters), reportage sur le Tour de France (idem), gonflage du Rumi (sur plusieurs numéros), etc. Luigi Colani couv BONBien que non signée, cette illustration révèle la "patte" de Luigi Colani le célèbre "designer" alors en devenir. Dans Motocycles, et à la même époque, il avait donné dans un style identique sa vision de la moto de l'avenir.

Dans les années suivantes, le deux-roues européen amorce un déclin qui va devenir fatal, comme on sait. Le mot Voiturette apparaît sous le titre Le Scooter. Dans les pages intérieures, le scooter a de plus en plus de mal à résister à côté d'essais d'Isetta, Mochet, Zündapp Janus, Vespa 400 et autres quatre roues légers, ou encore un reportage de 4 pages sur les 6 Heures de Paris... motonautiques !

Au numéro 76, le nom d'André Nebout disparaît de la revue. Le Scooter n'a plus que deux numéros à vivre.

Outre une documentation instructive sur la société des (plutôt jeunes) Français dans les années 50, la lecture de cette revue est émaillée de quelques réjouissantes "exclusivités" scootero-motocyclistes. Si les prototypes du Bernardet ou de l'AGF ou la première version du Taon Derny nous sont connus, le B 58 du Salon 1957 mérite le détour ou encore l'Autobiroue qui hante les nuits de Phiphi Devant (toute l'affaire sur philippe-devant.over-blog.com).

Boudier B 58 scooter 1957 322Présenté au salon de 1957, le scooter B 58 était l'œuvre de Pierre Boudier qui avait choisi un habillage en matière plastique sur un châssis à poutre centrale. (Source de ces informations dans la première bible du scooter : Tous les scooters du Monde, par Jean Goyard. Edition Ch. Massin).       Autobiroue 1318Pendant que Luigi Colani se projetait dans le futur, M. Ligier (oui, de la famille du même) passait à l'acte avec son (ses) Autobiroue qui connurent plusieurs versions, en duo ci-dessus, et en solo ci-dessous à l'arrière-plan. 

Autobiroue 2319

Comme on l'a compris, Le Scooter était ouvert à toutes les informations. Les inventeurs y avaient tribune ouverte et pouvaient, presque sans contrainte de place, y détailler leurs idées ou leurs réalisations s'ils allaient jusqu'à les concrétiser. Ainsi de R. Deneux avec son scooter entièrement réalisé en alliage léger sans aucune soudure et avec un résultat que pouvait lui envier bien des marques mieux établies...

 Scoot DR 1 bis311

La mode automobile est influencée par l'esthétique américaine. Le D.R. y a succombé lui aussi et sa "calandre" dissimule le bidon d'huile indispensable au mélange pour son moteur. 

Scoot DR 2 bis312

Non commercialisé, le D.R. n'aurait d'ailleurs jamais pu l'être sauf à changer l'emplacement de son phare. En effet l'homologation par les Mines exigeait que le phare soit à une certaine hauteur du sol. C'est pourquoi les Vespa français perdirent leur si élégant garde-boue avant qui incluait le phare, remonté devant le guidon.

Scoot-DR-BON-4314.jpg

Toute en cornière et rivetée, la fourche était à roue poussée et biellettes, inspirée de celle de Guzzi.

Scoot DR 3 bis313

La culasse reçoit des ailettes supplémentaires de taille généreuse et sans doute bien nécessaires, surtout avec ce volumineux silencieux bien près du cylindre.  

Scoot DR 3313

Le moteur est un 100 Motobécane deux-temps à allumage par volant magnétique. Ses trois vitesses se commandent au moyen d'une tringlerie avec double pédale au plancher. 

Scoot DR 2312

Un peu auto-tamponneuse vu de l'avant...

Scoot DR 1 ter311

... et vaguement Bernardet de l'arrière.

AGF Réacteur couv321

À la fin de son existence, Le Scooter en dépit de son titre était devenu très franchement motocycliste. En complément des photos de l'AGF Réacteur publiées ici dans le premier article sur les Coupes Moto Légende, cette couverture offre un angle inédit sur l'échappement. Il semble enveloppé dans une gaine (amiantée ?), sans doute pour protéger de la chaleur l'habillage du cylindre...   

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G
POUR INFORMATION, pour ce qui est de l'echappement de l'AGF reacteur:<br /> en fait cet echappement est pas enroule d'amiante mais bien specifique en une espece de tube annellé et coudé qui doit etre prevu pour un refroidissement et/ou une sonorité particuliere...<br /> si vous desirez une photo, je restaure une machine de ce type a trois vitesses<br /> amicalement<br /> Joel G
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Z
<br /> <br /> Bien sûr qu'une photo serait appréciée et même plusieurs le cas échéant ! Merci d'envoyer sur le mèle de : colette.bourdache@free.fr<br /> <br /> <br /> <br />