Il n’est pas en maillot de bain, mais la position est sans équivoque, ce pilote est un élève de « Rollie » Free à la chasse aux records sur le sel de Bonneville. En 2002 il est entré au Hall of Fame de l’AMA qui accueille tous les pilotes et personnalités qui ont bien mérité de la cause motocycliste. Ce pilote, c’est Martin « Marty » Dickerson, l’un de ceux qui ont écrit les plus belles pages de cette spécialité du sport américain dans les années 50/60. Admirateur de Rollie Free, il n’a eu de cesse de l’imiter, puis de l’égaler et enfin de le surpasser. Pour cela il lui fallait, comme son idole, une machine puissante et à l’époque, 1948, l’arme absolue pour un amateur est la 1000 Vincent-HRD. Marty achète donc une Rapide ce qui va l’amener à une rencontre capitale qu’il a racontée lui-même : « J’ai rencontré Phil Vincent une seule fois vers la fin 1949 je crois. J’étais allé avec ma Rapide au magasin de Mickey Martin, le distributeur Vincent de la Côte Ouest à Burbank. Mickey m’a présenté à Vincent puis il a dû s’occuper d’un client dans son magasin. Avec Phil Vincent, on a parlé de choses et d’autres et à un moment je lui ai demandé s’il croyait possible que j’atteigne les 220 avec ma Rapide. Il a réfléchi un instant puis il m’a dit « Oui, je pense que c’est possible ». Ensuite j’ai demandé si je pouvais acheter des échappements et un jeu de cames de Lightning. Il m’a répondu « Oui » mais quand j’ai demandé combien ça me coûterait, il a fait une pause puis m’a répondu : « Fiston, la vitesse, çà coûte cher ». J’ai avalé ma salive et je n’ai pas insisté.
(Photo archives Zhumoriste)
"Quelques mois plus tard, je reçois une grande caisse d’Angleterre : dedans il y avait deux échappements de Black Lightning et des cames de Black Lightning. Rien d’autre pas d’avis d’envoi, pas de lettre. Un jour, arrive un courrier de l’usine, c’était de Phil Vincent. Il me disait que ces pièces étaient gratuites. C’était sa façon de me remercier pour la publicité que je faisais à la marque Vincent car, apparemment, Mickey Martin lui avait parlé des résultats que j’obtenais dans des courses ici. Il s’excusait aussi de m’envoyer des tubes non chromés, mais à cause de la guerre de Corée le chrome était une matière rare ».
Ainsi équipée, la Rapide atteint 207 km/h dans sa catégorie, elle est battue quelques jours après par une 1000 Ariel. À nouveau en piste en 1952, Marty atteint les 226. Ce record sera battu à 243 km/h par une Kawasaki Z1 Yoshimura en… 1973. Le record de Marty avait tenu plus de 20 ans ! Entretemps, il a continué à battre des records mais dans d'autres catégories comme on peut le voir sur la grande photo où la Vincent est équipée d'un compresseur. Elle recevra aussi un carénage (photo en action avec le n° 2) limité car l'une des multiples catégories en vigueur à Bonneville exigeait que les deux roues de la moto soient visibles de profil (!). L'âge et des problèmes de vertèbres éloignent ensuite Marty de la compétition. Mais il ressort sa Vincent bleue de la naphtaline en 1996 et revient à Bonneville concourir en catégorie "vintage". Il signera sa dernière performance en 2007 sur une Vincent empruntée à un ami : 244,100 km/h. Il avait alors 80 ans !
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