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De Omega 1898 à Omega 1910

Oméga Capture d’écran 2012-01-24 à 15.41.12

Oméga 1910 logo plaque858La marque Omega de Martial Bergeron apparaît dans le motocyclisme à la fin de 1898, mais elle est déjà connue des "sportsmen" depuis sa victoire dans le Paris-Bordeaux cycliste de 1897, victoire signée par Gaston Rivierre. Cette Omega cycliste avait une transmission dite "acatène", c'est à dire assurée par...Rivierre dessin... un arbre rigide muni de couples côniques à ses extrémités (ce que les ignares d'aujourd'hui traduisent par "transmission à cardan", qu'il y ait ou non un (ou des) cardan(s). Cette particularité est conservée sur la "Pétrolette Omega", machine remarquable à plusieurs autres titres. D'abord son moteur est positionné au pédalier comme sur la Werner qui ne viendra que deux ans plus tard mais s'attribuera l'invention de la géométrie définitive de la moto (avec brevet à la clé, mais qui ne servira pas à grand chose). Oméga 1898860

Pour être en accord avec cette singularité, la Omega se devait de sortir des sentiers battus (il y en avait encore peu en 1898...) par la technique de son moteur. Et là, mazette il y a à voir ! Le tout est protégé par des brevets déposés entre novembre 1898 et janvier 1899, accompagnés d'une description du fonctionnement du moteur. C'est probablement dans ces textes que les gazettes du temps ont décripté cette technique originale. Dans La Revue Universelle qui, comme l'indique son titre, s'adresse à la multitude, la description est succinte et sans dessin explicatif. Celui-ci est publié par l'organe des professionnels L'Industrie Vélocipédique et Automobile avec sa longue légende reprise in extenso ci-dessous (en attendant, le lecteur peu versé dans la mécanique a le temps de prendre un café ou une bière, voire deux).  

Oméga 1898 moteur coupe861

 

"Ce moteur se compose d'un cylindre A venu de fonte et refroidi comme tous les moteurs semblables, par une série d'ailettes. Le piston, non représenté ici, ne présente aucun intérêt (sic).

"La culasse B est boulonnée sur le cylindre et porte en S la soupape d'aspiration (ndlr : d'admission en langage 2012). Cette culasse est, comme on le voit, d'une forme toute particulière : dans le haut, on voit un espace destiné à recevoir certaines pièces du carburateur ; en D, deux boulons permettent de fixer le carburateur et de le sortir rapidement en cas de non-fonctionnement.

(Ici le rédacteur place une description du refroidissement du cylindre. On la retrouvera en fin d'article)

"Le carburateur est placé, comme nous l'avons dit, sur le haut de la culasse, de sorte que le tricycle (ndlr : ?) se trouve un peu moins encombré. Ce Carburateur F est de forme cylindrique, séparé en trois chambres ; la première, arrivée d'air ; la deuxième, mélange de gaz à l'air frais ; la troisième, amenée des gaz à la soupape d'admission. L'essence arrive en G (ndlr : lettre oubliée sur le dessin qui désignait la pièce en T horizontal située en haut à droite et terminée par un petit robinet de purge à sa partie inférieure. Le robinet plus gros sert à purger le cylindre avec lequel il communique par le canal figuré en pointillés). L'essence suit les flèches, passe par le pointeau P qui permet d'en régler le débit, coule sur le cône où se produit l'évaporation. L'air arrive par l'ouverture Y réglable à volonté, passe dans la première chambre, traverse les toiles métalliques T qui la débarrassent des impuretés et vient lècher le pétrole qui coule sur le cône, de sorte que l'évaporation et le mélange des gaz à l'air se produisent dans cette chambre ; de là, les gaz carburés sont dirigés suivant les flèches. D'autres toiles métalliques se sont interposées pour mieux mélanger les gaz et pour empêcher en cas de retour de flamme les explosions dans le carburateur. Les gaz passent ensuite par la soupape S et se répandent dans le moteur (ndlr : le cylindre) où une bougie B les allume par étincelle électrique.

"Le mélange de l'essence se règle donc par le pointeau P et la quantité d'air par une manette qui ferme ou ouvre plus au moins l'ouverture Y. En variant cette ouverture et en serrant ou en desserrant le pointeau, on arrive rapidement à une carburation parfaite"

Fin de la partie concernant le fonctionnement proprement dit du moteur. La lettre E (sous B) figure la soupape d'échappement dont on ne dit rien de sa commande.

Le début de l'article s'étend sur la construction du cylindre dont les ailettes sont traversées de haut en bas par 10 colonnettes C creuses en laiton emmanchées à force. Elles sont censées améliorer le refroidissement car "Le cylindre, les ailettes et les tubes chauffent, l'air renfermé dans ces tubes prend de la chaleur au laiton (bon conducteur de la chaleur) et tend à s'élever comme dans une cheminée ; un tirage s'établit alors et l'air frais est aspiré par le bas au grand avantage du refroidissement". L'Industrie Vélocipédique se permettait alors une remarque car "le cuivre cède de sa chaleur plus rapidement que la fonte, il nous paraît naturel que ces tubes se rétrécissent sous l'effet de l'air frais plus rapidement que la fonte, de là une mauvaise adhérence et un mauvais refroidissement".

Et la revue de sortir prudemment le parapluie dans la conclusion de l'article : "Ce moteur n'ayant pas été mis en circulation, nous ne pouvons le déclarer bon ; nous avons simplement voulu le présenter au lecteur qui sera à même d'en voir les avantages et d'en apprécier les perfectionnements".

Il semble qu'aucun lecteur n'ait eu à apporter un témoignage quelconque et la "Pétrolette Omega" ne fera plus parler d'elle, à moins que...

... on retrouve en 1904 une marque Omega, mais c'est pour en apprendre la faillite (juin 1904). Les Frères Kreutzberger commercialisaient au 77, rue du Dessous-des-Berges à Paris, des tricycles de 2 CV 1/2 et 3 CV ainsi qu'une voiturette et une voiture légère. Se peut-il qu'ils aient pris à leur compte la fabrication de la "Pétrolette" de Martial Bergeron ? D'après une affiche des années 1890 (?) figurant sur le forum de "tontonvelo.com", Ils représentaient la bicyclette acatène Oméga (ci-dessous, à gauche). Sur le forum, une autre affiche Oméga d'un commerçant différent (ci-dessous, à droite) avec Usine, 22 avenue d'Italie, Paris, une adresse qui est la même que sur l'affiche en haut de cet article. Moralité : plus on en apprend, moins on en sait !

AfficheOmega_1895.jpg         omega2.jpg

 

 

 Oméga affiche859Cette affiche photographiée (avec flash !) il y a plusieurs dizaines d'années sur les murs du Musée di Rodo d'Alès, fermé depuis longtemps, représente une machine dont on (je) ne connaît pas d'autre trace. On peut la dater de 1903/1905 par son réservoir anguleux et plat, sa fourche rigide, son admission automatique. Ce qui intrigue, c'est la machine à coudre et le logo adjacent "Marque de Fabrique" qui se retrouvent sur un catalogue de ... Omega en 1910, propriété de M. Marius Lecomte et Fils ! (c'est le M.F.L. qui figure sur l'écusson de la colonne de direction présenté en tête de cet article).

Oméga 1910 couverture ca856

Omega--dessin-marque862.jpg

Cette fois, le catalogue est daté 1910 et il présente une machine déjà un peu rétrograde par rapport à la concurrence française de l'époque. Un examen plus attentif et comparatif permettrait peut-être de déceler une production d'une grande marque, procédé couramment pratiqué chez Alcyon, pour ne citer que celle-ci. Au bénéfice du doute, on prendra donc cette Oméga 1910 pour une construction originale, mais avec réserve. Après la guerre 1914-1918, les Ets Lecomte & Fils ne figurent plus dans le répertoire des professionnels qu'au chapitre "Machines à coudre et Cycles".

Oméga 1910 Catalog855

Ci-dessous, en bas à gauche, figurent un numéro dans une série (?) puis l'année d'impression (1910) et enfin le chiffre de tirage : 15 000 exemplaires.

Oméga 1910 intérieur857

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