Donc, depuis le 24 septembre le quotidien Le Monde propose une formule « weekend » toute nouvelle en plusieurs cahiers à la façon anglo-saxonne. Un cahier 'Sport & Forme' de 8 pages comprend une rubrique ‘Agenda’ qui recense les grands événements de la semaine à ne pas manquer à la télé : rugby (inévitable), cyclisme, football, Formule 1, athlétisme, rallye automobile. Au total 15 sélections, mais pas un mot sur la motocyclette. Pourtant un coup d’œil sur un hebdo de programmes télé montrait que la chaîne Motors TV allait (et a) consacré plusieurs heures de direct aux essais des 24 Heures du Mans Moto puis, le samedi et le dimanche, à la course elle-même avec l’arrivée. On pourrait aussi ajouter les informations sur le développement de l'épreuve, données par tous les journaux télévisés des autres chaînes. Mises bout à bout, ça doit faire un bon paquet d'heures de diffusion.
La Kawasaki des vainqueurs, première devant tout... le monde
Oui, couinez-vous, mais Motors TV est une chaîne câblée (cryptée ?) pas accessible au commun des téléspectateurs. Bien sûr, mais elle n'est pas plus câblée que les multiples émissions des cryptées Canal+ ou Eurosport distinguées, elles, dans l’agenda du Monde. On ne veut pas croire que pour le « journal de référence » (des persifleurs disent de « déférence ») les 24 Heures du Mans sont un non-événement. En tout cas pas aussi digne d’être sélectionné comme l'a été le match de cricket (samedi 24, 16 h 30) entre les Mumbaï Indians et les Chennai Super Kings. Déjà qu’il faut être né Britannique – ou faire partie du Commonwealth - depuis plusieurs générations pour comprendre les règles du cricket, combien de téléspectateurs français s’y intéressent-ils ? Il y a 1200 licenciés cricket en France. Et 70 000 licenciés moto…
P.S. : les Mumbaï ont gagné !
P.P.S. : Présentant sa nouvelle formule, Le Monde écrivait le 23 septembre : "Objectif de notre cahier Sport & Forme : combler tous ceux qui s'intéressent de près ou de loin à la grande actualité sportive". L'intention est louable...
DERNIÈRE HEURE… DERNIÈRE HEURE… DERNIÈRE HEURE…
Au moment de mettre sous presse (...), quelques informations supplémentaires viennent d'arriver et, étourdi que je suis, j'allais oublier de vous signaler que la moto fait une entrée quasi-triomphale dans Le Magazine du Monde, autre supplément du week-end (message à la maquette : il faudrait que le journal vende des lunettes avec pour qu'on puisse lire les légendes des photos). Donc, de la moto dans ce Magazine, et pas qu'un peu, une double-page toute en couleur pour mettre en valeur une Norton Commando ! Hélas, une voix féminine qui lit par dessus mon épaule me susurre que cette belle image est là pour mettre en valeur... un sac de dame. Damned ! c'est de la pub ! donc c'est payé. J'avais à peine vu le nom de la marque, je pensais tout bêtement que c'était l'endroit où la photo avait été prise... Moi qui déjà croyais à une nouvelle politique de Le Monde... Déçu, je suis.
Je pensais me rattraper dans les pages 'Culture', alléché par une photo timbre-poste illustrant le sommaire en début du magazine : on y distinguait une roue de motocyclette. Devant la page en question, déception encore. Une seule photo et d'un rapport assez lointain avec la moto, malgré la roue visible "parasitée" par la jambe nue de la demoiselle. Là, il me semble que Le Monde a raté quelque chose. Dans ce magazine qui dit vouloir accorder une grande place à la photo, il y avait de quoi justifier cette revendication en publiant un port-folio important sur le travail de l'artiste marocain Hassan Hajjaj, auteur de cette photo. Sous le titre parodique "'Kesh Angels", il a réalisé une série mettant en scène des jeunes filles de Marrakech (en anglais Marrakesh), assises en solo ou en groupe sur des motos et des scooters de marques indéterminées sauf pour une Mobylette ou une Pigeot. Oublieuse du très british tongue in cheek qu'on pourrait traduire par "foutage de gueule", une galerie d'art anglaise a présenté ces photos accompagnées d'un texte qui navigue entre la langue de bois des politiques et le lyrisme des journalistes commentateurs de mode féminine, texte que voici, traduit à la louche : "Dans cette nouvelle série, Hassan Hajjaj rend hommage à la culture biker (ndlr : on ne pouffe pas SVP !) des jeunes femmes de Marrakesh : les 'Kesh Angels. Leur force, leur style, leurs poses ont été parfaitement saisies par ces photos pétillantes dans le décor de la Médina". (Pour les anglophones, voici le même texte en V.O. : In this new series, Hassan Hajjaj pays tribute to the biker culture of the young women of Marrakesh : the 'Kesh Angels. Their great strength, style and attitude are captured perfectly in vibrant posed photographs framed with ephemera from the Medina). Entre parenthèses, les tenants de la Biker Kulture devraient en faire une jaunisse. Le Magazine du Monde trouve que ces images sont "kitsch et subversives" car elles mélangent "des univers qui n'ont rien à voir". Tiens, v'la aut' chose ! Subversif de marquer des babouches du sigle LV (Louis Vuitton) ou de les décorer avec les trois bandes Adidas ? Subversif de faire porter à ces jeunes filles un voile LV (encore) ou Nike ou les habiller d'une robe siglée des deux "C" de Chanel ? Kitsch ? Peut-être quoique ce mot veuille dire en 2011, mais "ringard" est sans doute plus approprié (sans vouloir faire de peine aux annonceurs du journal en question...)
Aujourd'hui émigré en Grande-Bretagnes, Hassan fait le "buzzz" londonien en décorant des boîtes à la mode, utilisant les débris de la société de consommation. Des casiers à bouteilles de Coca Cola recouverts de coussins taillés dans des sacs de farine font un très solide canapé, un bidon de peinture (un "camion") sert de tabouret tandis que les murs sont tapissés de cartons d'emballages. Tout ceci est constellé d'inscriptions en arabe d'un fol exotisme, my dear. Et vous ne connaissez pas la meilleure : il fait venir tout ça du Maroc par pleins containers !