Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

C.P. ROLEO : enfin la gloire (suite)

En 4 années d’existence à peine, de 1925 à 1928, C.P. Roleo a utilisé les moteurs deux-temps ou quatre-temps de 5 constructeurs différents. Pas de quoi fidéliser une clientèle et encore moins l’agent (concessionnaire) de la marque, noyé par la farandole des pièces détachées correspondantes. La standardisation était sans doute le dernier souci de C.P. Roleo qui, jusqu’à son extinction fera encore son marché chez d’autres motoristes. Cet éclectisme brouillon révèle une "navigation à vue" qui n'empêche pas certains audacieux de faire totalement confiance à cette marque dans les entreprises les plus risquées. Ainsi d'un périple à travers une Europe quasi-moyenâgeuse dans ses voies de communication. D'autres affrontent aussi les obstacles du long voyage, sportif celui-ci, mais dans les limites des frontières nationales. Enfin C.P. Roléo osera une incursion, brève mais honorable, dans la compétition de vitesse.

1928-CP-Roleo-Sexe-LMP-500-Archives-copie.jpg

Étonnante rencontre en 1928 quelque part en Roumanie de Robert Sexé (à gauche sur une Gillet culbutée) et un autre grand voyageur parisien dont j'ai oublié le nom. Sa monture est une C.P. Roleo à moteur 500 L.M.P.

L’année 1928 a démarré doucement chez C.P. Roleo dont la vedette en endurance, Renaud (350 deux-temps), a remporté son habituelle médaille d’or dans Paris-Nice, de même que son co-équipier Carré (350 quatre-temps L.M.P.) et de même aussi que 109 autres concurrents (121 arrivés sur 147 engagés). Tous on déclaré que l’épreuve n’était pas assez dure. On allait le dire ! La marque est absente dans les épreuves suivantes qu’elle avait l’habitude de disputer : côte d’Argenteuil, de Château-Thierry, Tourist Trophy français. D’ailleurs ce sont plutôt ses pilotes qui en sont absents, car si la publicité exploite bien leurs résultats dans les revues, leur engagement se fait sans doute à titre personnel. Souvent il s’agit d’agents de C.P. Roleo désireux d’augmenter leurs ventes grâce à d’éventuelles performances susceptibles d’être affichées (au blanc d'Espagne !) dans leur vitrine. Le procédé - premier degré de la publicité - était pratiqué par tout le monde et il perdurera jusque dans les années 60/70.

1928 CP Roleo Paris-Nice933La langue française savamment utilisée cache des subtilités profitables. Ainsi ces "ex-œquo" seraient bien moins valorisant sans le "1 er" qui les accompagne et avec une différence significative dans la grosseur de caractère. 

Déjà utilisé précédemment pour les machines à moteurs quatre-temps (article du 27 mai 2013), le guide de graissage C.P. Roleo-Kervoline de 1928 nous fournit quelques rares indications sur les modèles à moteurs deux-temps. 

1928-CP-Roleo-LMP-2-temps-ARCHIVES.jpg1928-CP-Roleo-175-kervol034.jpgPeu présent dans les publicités C.P. Roléo, le moteur deux-temps est pourtant celui qui va rapporter les plus grands succès à la marque. Les 26-27 mai, elle gagne le Bol d'or 1928 en catégorie 350 comme elle l'avait fait en 1926.1928 CP Roleo Bol Fournier 885Le moteur Harrissard a été remplacé par un Pauvert qui a permis à Fournier son pilote de tourner à la moyenne de 60,262 km/h, ce qui lui donne aussi la deuxième place au classement général. La victoire absolue est revenue à Vroonen sur une 500 culbutée Gillet, à 63,396 de moyenne. Sur une autre 350 C.P. Roleo, Renaud a fini 4ème, à 16 tours de Fournier (Circuit de St-Germain-en-Laye).

1928-CP-Roleo-Bol-bigger-ARCHIVES.jpgAu Bol d'or précédent, Fournier avait terminé 7ème sur une 175 à moteur Aubier-Dunne. Cette marque était apparue au début des années 20 avec un moteur deux-temps dont l'alimentation par distributeur rotatif tranchait sur les normes françaises. Est-ce ce qui a pu donner l'idée à Fournier de persévérer dans cette voie avec son Pauvert à deux carburateurs juxtaposés ? On en restera aux suppositions en l'absence de toute autre information sur cette particularité qui n'a malheureusement pas suscité la curiosité des gazettes spécialisées. On reverra encore des Pauvert à distribution directe dans le carter-moteur, mais cette fois avec un seul carburateur.

1928-CP-Roleo-pub-bol-d-035.jpgPas d'excès de publicités après la performance de Fournier qui a l'intérêt de confirmer le montage du Pauvert, ce qui n'est dit nulle part ailleurs. Deux ou trois parutions de cette demi-page et on passe à autre chose...

Fournier et Renaud sont de nouveau à la tâche les 6-7 et 8 juin dans les Trois Jours du Forez qui intéressent les grandes usines dont Peugeot ou Gnome-Rhône au point d'y déléguer leurs champions. C'est une dure épreuve de régularité à travers le Massif-Central dont "les routes, signale Moto Revue, sont en très mauvais état. On se demande où en est la cause lorsqu'on fait la comparaison avec certains départements où routes nationales et routes départementales on été refaites complètement (...)". Les deux pilotes de C.P. Roléo, respectivement sur une 350 deux-temps et sur une 350 quatre-temps, échapperont aux collisions diverses (arbres, automobiles, animaux errants) pour terminer sans pénalisations, récoltant la médaille d'or.

Pas de C.P. Roléo dans Paris-Les Pyrénées-Paris des 21-29 juillet. Du moins pas dans les classements de ce qui était l'une des épreuves-phares de la saison d'endurance. On a des nouvelles de la marque un mois plus tard lorsque deux 350 sont engagées par Renaud et Hémet au Championnat de France de l'U.M.F. ! Dans une course de vitesse sur le béton de Montlhéry et sur 300 km (60 tours), les C.P. Roléo vont se frotter à quelques pointures dont Perrotin, l'as de Terrot ou Boetsch (Magnat-Debon). Le plateau est complété par Alcyon et Soyer car ne peuvent concourir que des machines1928 PERROTIN bis TERROT Archives françaises à 100 % ce qui élimine Monet-Goyon et les marques qui montent des boîtes à vitesses, des carburateurs, des magnétos d'origine étrangère. Dès le départ de ce Championnat le train est rapide, Boetsch mène à 103 au tour puis Perrotin passe au commandement après l'abandon de la Magnat-Debon. À la mi-course, Renaud est deuxième suivi par Hémet. La moyenne baisse à 93 km/h, mais Renaud doit abandonner au 42ème tour et Hémet a disparu. Perrotin est Champion de France 350 après avoir doublé tous ses adversaires à la mi-course (photo ci-contre). Il n'y aura pas de Champion en 500 car personne n'a osé prendre le risque de s'engager lorsqu'on a appris que le titre ne serait pas décerné si le vainqueur éventuel ne réalisait pas une moyenne supérieure à celle des 350... Dans les compte-rendus de ce championnat, la presse est muette sur les machines - quelle que soit leur marque - et tout ce qu'on peut dire des C.P. Roleo, au vu d'une silhouette sur une photo de Moto Revue, c'est qu'il s'agit de quatre-temps, trahis par la hauteur de leur tubes d'échappement, sans doute des L.M.P. C'est maigre...

L'exploit de C.P. Roleo, car c'en est un, est salué par Moto Revue. Plutôt réservée d'habitude, surtout lorsque ses annonceurs favoris sont en cause, la revue écrit : "Roléo a tenté aussi le Championnat de France ; il y en a qui ont déclaré doctoralement que c'était maladroit pour la C.P. de s'aligner contre des adversaires plus rapides. Pas du tout, nous trouvons au contraire que c'est très adroit et Roléo a tenté sa chance sur 300 kilomètres avec plus d'esprit que d'autres, car il sait que la vitesse pure intéresse une certaine clientèle, mais que la majorité actuelle des acheteurs recherche plutôt la solidité et la durée. Roléo a terminé avec aisance l'épreuve ; les autres, ceux de la vitesse, n'ont pas eu d'anicroche, c'est très bien ; Roléo non plus, c'est parfait aussi, car Roléo a été beau joueur : on ne gagne pas à tous coups, c'est entendu". Article louangeur, quoiqu'un peu ambigu, et qui pouvait faire croire au lecteur peu attentif que C.P. Roléo "a terminé l'épreuve". C'était vrai... sur 160 kilomètres.1928 CP RolePub Salon MR897

ON SOUFFLE UN PEU !  

À l'occasion du proche Salon de Paris, Moto Revue publie le rituel répertoire de la production française. C.P. Roléo y figure avec un catalogue très fourni comme il se doit, détaillé également dans celui de Saint-Martin Automobiles (vous n'aviez pas oublié ? !).1929 CP B1 deux temps hautSelon Moto Revue, il existe en plus deux modèles en 175 deux-temps équipés du moteur L.P.L., toujours aussi mystérieux. Mais il se trouve ainsi confirmé dans son intitulé qui ne provient pas d'une erreur typographique, hypothèse avancée dans l'article précédent. Ceci étant et sauf plus ample informé, ce L.P.L. n'est mentionné que sur des C.P. Roléo. Il équipe donc une Type A à 4 000 F et une A "Confort" (4 350 F) qui reçoit des pneus de plus forte section, selon une tendance apparue en cette époque de confort aussi sommaire que les suspensions dont il dépend. Motorisées également par L.P.L. deux 250 sont proposées à 4 235 F ou 4 585 F avec pneus Confort.  

1929 CP C2 deux temps bas 350Comme chez les 175 et 250, il existe en 350 une Confort (Moto Revue) à 5 960 F contre 5 550 F au modèle 350 à pneus ordinaires. Le moteur à "admission directe au carter" décrit ci-dessus par St-Martin Automobiles est un Pauvert. Les différences de prix s'expliquent par le fait que ce catalogue volumineux devait être préparé bien avant le numéro de Moto Revue publié, lui, peu de temps avant le Salon.

CP-Roleo-Pauvert-1927-10.jpg Un Pauvert à admission directe et dans un bel état d'origine. À moins qu'il ne s'agisse d'une option d'époque, il semblerait que deux positions de selle existaient conjointement : celle de la photo et l'autre, plus "cycliste" avec la selle fixée sur une potence dont le tube vertical était introduit dans un autre tube soudé au cadre (Archives F.-M. Dumas).    

1929 d St Martin page CP 4 temps montageSortie de nulle part, une 350 à soupapes latérales s'inscrit au programme C.P. Roléo (ci-dessous). Pas de pièce d'identité mais on va le retrouver sur les images du catalogue de l'année suivante. Il est fort probable qu'il s'agissait d'un moteur Voisin....

1928-Voisin-pub-MR043.jpg... qui était déjà présent sur une 350 D.F.R. en 1927.

1928-Voisin-pub-MR-MONTAGE.jpgÀ gauche, un agrandissement du moteur qui figure dans la publicIté Voisin de 1928 (Moto Revue). À droite, détail du même Voisin 350 de la D.F.R. figurant au catalogue de la marque en 1927. Pourtant signé d'un - ô combien ! - célèbre constructeur d'avions puis d'automobiles, il ne déclencha guère d'intérêt, pas plus que le culbuté ou le deux temps annoncés. Même aujourd'hui les sites, blogs ou forons consacrés à Gabriel Voisin font l'impasse totale sur ces moteurs. Se pourrait-il qu'il n'en soit pas pleinement l'auteur ?

1929-st-martin-CP-C4-SL-BON.jpg

Ricardo 133-1La culasse Ricardo dont il est question dans le texte ci-dessus (Document : histomobile.com) est un dessin particulier de cette pièce dû aux recherches de l'ingénieur britannique Harry Ricardo (1885-1974) Elle procurait une meilleure compacité de la chambre de combustion, accélérant d'autant la propagation du front de flamme. Il est précisé que cette culasse était démontable, par opposition aux culasses qui faisaient corps avec le cylindre (on parlait alors de cylindre "borgne") et qui avaient encore cours à l'époque. Je n'ai pas d'explication pour l'adjectif "double"...

1929-cp-roleo-BON-D5-sport.jpgÀ 7 200 F, la 500 culbutée D5 était au même prix qu'une New-Map à moteur JAP, une Koehler-Escoffier ou une 1000 René Gillet. Elle valait plus que la Gillet 500 de Robert Sexé, une Rovin JAP ou une 350 Royal-Enfield, toutes des culbutées. Guère étonnant que les C.P. Roleo soient si rares en collections.

LA SURPRISE DU SALON 1928 ! 

Aussi bien Moto Revue que Saint-Martin Automobiles peuvent remballer leurs papiers car ils sont dépassés par ce qu'expose le stand C.P. Roléo du Salon de Paris : une 500 à moteur Staub-JAP double échappement (et non à "4 soupapes" comme il fut écrit il n'y a guère par quelqu'un qui avait la vue moyenne...). Incorrigible, C.P. Roléo accroche un nouveau scalp à sa ceinture de constructeurs de moteurs, ceinture déjà riche de Béchir & Collin, Harrissard, L.M.P., Pauvert, Voisin !  Staub, déjà son fournisseur de boîtes à vitesses, sera le sixième de la liste car C.P. Roléo n'a pu résister à l'attrait d'une technique nouvelle, celle du bloc-moteur. Nouvelle et sans doute plus économique car Staub pratique des tarifs très concurrentiels. En 1933, il proposera ses moteurs avec 30 à 40 % de réduction si on les achetaient par 10 ! Il est vrai que la crise était passée par là...

CP Roléo 350 G5 Staub Jap colo ARCHIVESrConstructeur spécialisé dans les boîtes à vitesses et les moteurs agricoles, Staub propose donc un bloc-moteur 3 vitesses pour motos et cyclecars. Il est composé d'un bas-moteur de sa propre fabrication sur lequel est fixé un cylindre avec sa culasse, tous deux fournis par l'anglais JAP. La distribution s'effectue par soupapes latérales ou soupapes en tête. C'est ce dernier type qui équipe les C.P. Roléo du Salon, en deux cylindrées, 500 et 350 cm3. Cette dernière est présentée dans une finition en émail craquelé "on la dirait recouverte d'une peau de crocodile", s'étonne Moto Revue. Autant pour les youngtimers et autres customeurs qui croient avoir inventé le genre...

(À suivre)

En inscrivant votre e-mail dans la case "newsletter" en bas de colonne à droite de cette page vous serez prévenu par e-mail dès qu'un nouvel article sera mis en ligne : c'est entièrement GRATUIT !  

 

Retour à l'accueil
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
M
Ta réponse dernière réponse t'honnore Bourdache Jean,elle reflète le vieux gricheux chagrin qui ne s'est et se contente de faire que la compillation et les synthèses d'articles journalistes<br /> condescendants cherchant à vendre leurs papiers sans prendre la moindre peine d'an vérifier le bien fondé ............ pathétique !<br /> <br /> Faut-il être con pour affichier et surtout laisser les commentaires d'une personne que l'on apprécit pas sur son propre blog !<br /> <br /> Hasta la vista Bourdache !.
Répondre
M
Bonsoir,<br /> <br /> Si j'ai écrits "coquille" et non connerie par exemple, c'était pour deux raisons :<br /> - Etre aimable a ton endroit ;<br /> - La documentation que je possède émanants des Etablissements Rollet et Cie donne les deux orthographes manucrites Lexanne et Lescanne et qu'il n'est nul mention de motorisation L.P.L.<br /> <br /> Quand à l'acronyme L.P.L tu nous en feras la démonstration.<br /> <br /> Enfin, si mes commentaires te rendent chafouin, chagrin..., pourquoi les publier ? Pourquoi perdre ton précieux temps en y répondrant avec autant de fiel ?<br /> <br /> Ne crois-tu pas qu'un simple appel téléphonique t'aurais fixé sur mes intentions ? Mais non, vaut mieux se draper d'offuscations à défaut de vertue.<br /> <br /> Bref, c'est promis, je ne posterais plus sur ton blog....... bien le bonjour chez toi.
Répondre
Z
<br /> <br /> Enfin une bonne nouvelle !<br /> <br /> <br /> <br />
M
Bonjour,<br /> <br /> Désolé mais il y a une grosse coquille. Les CP Roléo A et B n'ont pas été équipée de moteur inconnu L.P.L mais bien de Lexanne 175 et 250cm³.<br /> <br /> La 250 Pauvert est le type B4.<br /> <br /> Bien le bonjour
Répondre
Z
<br /> <br /> Bonjour,<br /> <br /> <br /> Désolé, mais pas autant que moi de découvrir cette confusion faite entre COQUILLE et ERREUR. La coquille est une faute de composition typographique (exemple : une lettre manquante dans un mot ou<br /> pas à sa place), c'est une mauvaise manipulation d'ordre technique qui peut se produire aussi dans l'usage d'un clavier (machine à écrire, ordinateur, etc). L'erreur, et dans le cas présent c'est<br /> de cela qu'il s'agit, dont je suis accusé, consiste à se servir d'un mot pour un autre, nom commun ou nom propre. Donc j'ai parlé d'un moteur L.P.L. alors que j'aurais dû écrire Lexanne. Je veux<br /> bien, mais parlons-nous bien de la même chose. Moi je ne connais pas Lescanne mais je connais LESCANNE, qui doit être l'un des "L" dans l'acronyme L.P.L., marque que je me proposais de traiter<br /> dans l'article suivant sur C.P. Roléo. À la fin du dernier article figure la mention (À suivre). Pour quiconque est habitué à la lecture d'une revue ou d'un journal, cela signifie que l'article<br /> n'est pas terminé. Mais à la fin d'un texte qui demande un effort il arrive que la vue faiblisse...<br /> <br /> <br /> Bonjour chez vous <br /> <br /> <br /> <br />
M
A ma connaissance le Grand Gabriel (Voisin) a toujours eu ses usines à Issy les Moulineaux, pas à Levallois. Il s'est égaré une fois à faire un moteur auxilliaire pour vélo, sans suite. Je penche<br /> donc pour un homonyme.
Répondre