Depuis la plus haute antiquité, Ronald Florens organise à De Haam, en sa natale Belgique, la "Oude Klepper Glorie" devenue la "Oude Klepper Parade", ce qui paraît tout de suite plus compréhensible. Lorsqu'on sait que Klepper = soupapes qui font "gloup-gloup" et Oude = vieux, on voit déjà mieux de quoi il s'agit. Ch'ti bon teint, Gilles Destailleur (sans 's' à la fin, il y tient) ne pouvait que participer à cette Parade dont on le voit prenant le départ ci-contre. En d'autres temps il fut le gourou de la Balade des Vieux Clous et aujourd'hui il écume toutes les réunions d'anciennes au guidon de sa Triumph 'Trusty' 550 latérales, une ex-militaire (de 14-18...). Armé de son Kodak il nous fait cadeau d'un reportage. En télé-travail et sans le son, malheureusement. Alors on s'y colle mais comme la liaison n'est pas très bonne - p.!*%*$ ! de sal... d'ordinateur, de wi-fi et tout ça - vous voudrez bien pardonner les scories dans les textes accompagnant ces photos écrites entièrement à la main. Pour des raisons de logistique et de sécurité, Ronald a limité à une soixantaine le nombre de participants. Limité aussi était l'âge des machines admises soit l'année 1920. Autant dire que ce n'étaient pas des bécanes de tous les jours qui ont parcouru les 70 km autour du pays d'Ostende ! Pour vous situer le programme, il y avait en entrée une Léon Bollée - que Monsieur Léon tenait à appeler des "Voiturettes" - et un tricycle à moteur De Dion-Bouton. Pour la suite du menu une visite guidée s'imposait : c'est ci-dessous.
Spectacle gratuit et coloré (voire sonore) que commentent les riverains de la grande artère à De Haam où étaient rassemblées les machines dans un parc à l'arrivée de la seconde journée
Avant de se consacrer avec un succès international à la construction automobile, Minerva fut un des pionniers de la moto belge. Ses moteurs étaient exportés en Europe et la marque pris même pied en France, d'abord en motorisant les machines Georges Richard puis en vendant ses propres motos sous le sigle Gobron-Minerva après accord avec le constructeur automobile Gustave Gobron. Cette Minerva bicylindre à soupapes latérales (de l'année 1907, pilote : Harry de Boer, NL) est équipée de série d'une suspension de fourche avant Simplex d'origine française, à coulisseaux et ressort à lames. Avec ses machines de compétition monos ou bicylindres en V, Minerva se tailla de beaux succès, autant sur pistes de vélodromes qu'en circuits dont celui très réputé et difficile tracé dans les Ardennes belges. En 1953, la marque revint brièvement au deux-roues motorisé avec la construction sous licence du scooter italien M.V. 125 cm3 deux-temps.
Cette robuste bicylindre Saroléa à soupapes automatiques de 1907 (pilote: Stany Wouters, B) nécessita une petite remise à niveau au terme de la première journée. Rien de moins que le démontage complet de son train avant : roue, guidon, fourche avec son T de direction pour un remplacement de quelques billes défaillantes dans les roulements de cuvettes. Bien sûr, en l'absence d'un concessionnaire Saroléa dans la région, c'est Harry son pilote qui a procédé lui-même à cette intervention avant de reprendre la route sans autre problème. Business as usual, comme ils disent en Grande-Britannie. Somptueux attelage d'une Humber monocylindre à soupapes latérales et d'un side-car en vannerie. On ne se lasse pas d'admirer le travail de l'artisan qui peut être fier d'avoir signé cette véritable œuvre d'art.
La 350 Type Paris-Nice (pilote : Benedict Canneyt, B) est une des meilleures ventes de Peugeot et aussi une réussite technique remarquable. Son moteur fiable à soupapes latérales et sa suspension avant par fourche Truffault, gage d'un confort certain - quoique élémentaire - en faisaient une machine apte à couvrir des distances appréciables.
Beardmore-Precision est une des deux ou trois marques anglaises qui ont fait confiance à un moteur sans soupapes, mais qui n'est pas pour autant à ranger parmi les deux-temps. Dit "à fourreau louvoyant", le Barr & Stroud se compose d'un piston entouré d'une chemise percée de lumières. Montant, descendant et tournoyant ce fourreau permet ou condamne l'accès des gaz aux transferts. Aussi compliqué que ça en a l'air, mais très pratiqué en automobile et en aviation (exemplaire de 1920, pilote : Terry Hopes, GB).
En trois photos on survole près d'un quart-de-siècle de la production de la Fabrique Nationale d'armes de guerre, marque-phare de la Belgique. Comme chez nombre de constructeurs au tournant du XXè siècle, ce premier modèle F.N. à moteur "maison" de 1902 a une cylindrée modeste (133 cm3) et motorise vaillamment ce qui reste une bicyclette à peine renforcée.
Dès 1904 paraît une 4 cylindres de 365 cm3 à transmission par arbre qui va rendre la F.N. célèbre dans le monde entier. Aux mains du pilote français Georges Osmont, champion e vitesse sur tri De Dion-Bouton, elle a fait le tour de l'Europe avant sa présentation officielle au Salon de Paris 1904. Elle n'était pas la première 4 cylindres de l'Histoire, mais c'est celle qui a connu le plus grand succès commercial. Sans cesse modernisée (boîte de vitesses, fourche suspendue, mise en route du moteur par kick-starter en remplacement du pédalier, etc), cette machine figurera au catalogue F.N. jusqu'au milieu des années 20, ayant au cours des ans troqué son arbre pour une classique chaîne. Elle aura aussi pris de l'embonpoint et termine sa carrière en 750 cm3. L'exemplaire ci-dessous est de 1914 (pilote : Guido Vancraeynest)
F.N. propose en 1909 une monocylindre dont la courroie de transmission est remplacée par un arbre, comme sur la 4 cylindres. Le moteur de cette 250 a une distribution avec échappement commandé et admission automatique et il est accouplé à une boîte de vitesses à deux rapports. Cette machine disparaît en 1923, ayant subi le même parcours que la 4 cylindres avec des modernisations successives : distribution semi-culbutée (l'admission est commandée par tige et basculeur) et la cylindrée est portée à 285 cm3 (modèle 1919, pilote : John Graal, NL) .
Pare-brise et capote, tablier pour protéger les jambes, le passager (qui est le plus souvent une passagère) de ce britannique side-car New-Hudson 770 cm3 de 1913 est particulièrement choyé(e). Tout aussi remarquable, la présentation bicolore en 'café-crème' qui se démarque des tenues sombres en vigueur sur notre continent. Cet attelage vaudra le 1er Prix à Pascal Rabier son pilote français. Exception colorée pour cette Gillet d'Herstal (1920, pilote : Michel Steins, B), le troisième grand de la construction motocycliste belge. Longtemps cette marque sera fidèle au deux-temps en bloc-moteur avec distribution rotative. Ses machines seront rendues célèbres par les voyages au long cours de l'infatigable "raider" français Robert Sexé.
Avec son réservoir en cuivre nickelé, cette Griffon 1904 (pilote : Jürgen Hammerschlag-Mäsgen) est l'exemple de l'ancêtre restauré sans excès ni accessoires cuivrés, tels qu'une lampe d'éclairage. De jour, le motocycliste des années 1900 avait déjà assez de mal à éviter les fondrières des routes, les attelages de chevaux et de bœufs, les troupeaux de bétail, les attaques des chiens errants, alors rouler de nuit c'était courir à la catastrophe !
Juste pour rire, un ramoneur de fantaisie comme on n'en fait plus bricole sur la Douglas 1914 de son camarade Richard Mummery. Avec les Triumph monos latérales, les flat-twins Douglas furent les machines les plus répandues - et appréciées - durant le conflit 1914-1918. C'est dans les conditions les plus extrêmes que l'une et l'autre marque établiront leur réputation de fiabilité. Une réputation qui sera exploitée largement et avec succès après le conflit lorsque le gouvernement britannique mettra en vente ses surplus militaires.
La Coulson-B de 1920 présente une caractéristique exceptionnelle dans la construction de l'époque : sa roue arrière est suspendue ! Grâce à une triangulation étudiée la transmission par courroie fonctionne parfaitement au prix d'un débattement tout de même limité, même si ladite courroie peut absorber les glissements éventuels sur la poulie-jante. C'est Indian qui a popularisé la suspension arrière avant 1914 en faisant appel à des ressorts à lames comme sur cette Coulson-B (pilote : Raymond Hudson, G-B), mais sur l'américaine la transmission finale était assurée par une chaîne. L'ABC contemporaine de l'Indian avait aussi une suspension sur ressorts à lames.
En 1914, Scott proposait déjà une machine avec fourche télescopique, une commande des vitesses par pédale au pied outre un moteur deux-temps bicylindre à eau. Originale jusqu'au bout, les Scott avaient un cadre ouvert façon "dame". Mais sur ce modèle de 1914, la meilleure place est dans le side-car dont la couleur est emblématique des Scott (pilote : Roger King, G-B).
Dans son modeste catalogue millésimé 1898, Léon Bollée précisait que ses Voiturettes Automobiles "tiennent le milieu entre la voiture et les cycles automobiles" et qu'elles peuvent "être mises entre les mains de tous étant simples, faciles à conduire et très stables". Stable, sans aucun doute, la Léon Bollée demande toutefois un certain doigté car embrayage, débrayage, changement de vitesse (3 rapports) et freinage s'effectuent par un levier unique, celui qu'on voit ici au premier plan et qui se termine par "une poignée de pelle". Trois modèles étaient proposés : à une place, le siège avant étant supprimé, à deux places comme ci-dessus ou à trois places. Dans ce dernier cas, le fauteuil avant était remplacé par une banquette assez large pour accueillir deux personnes côte-à-côte. Les performances dépendaient du nombre de passagers qu'emmenaient deux types de moteurs. Avec le n° 2 on atteignait 30 km/h et on poussait à 36 avec le n° 3. Mais en compétition où les Bollée étaient la terreur des tricyclistes, le moteur pouvait être un 8 ch. Insatisfait malgré tout, un amateur se construisit une Bollée avec deux moteurs, un de chaque côté de la roue arrière. On ne sait rien de la conduite d'un tel engin !
Gants de chirurgien pour opérer sur des ancêtres, on respecte la vieille mécanique à De Haam ! Cette Terrot de 1914 à soupapes latérales est dans un magnifique et rare "jus" d'origine. Mais quel dommage pour ce phare et la canalisation qui l'alimente ! (Pilote : Henk Van der Veen, NL)
Curieux : il y avait sept machines françaises à De Haam et trois engagés français, mais aucun sur une machine française, étonnant, non ? Ainsi ce tricycle Rochet de 1900 à moteur De Dion-Bouton de 385 cm3 est la propriété de Philippe Sonet, un Belge avisé qui connaît les belles - et bonnes - pièces. On l'envie... En plus d'avoir motorisé quantité de marques, Motosacoche produisait ses propres machines comme ce modèle de 1912 (pilote Paul Dhondt, B). Certaines furent construites (sous licence ?) par Matchless ou Clément. Leur changement de vitesses à chaînes commandé par le levier dit "moulin à café" (en travers sur le réservoir) les rendaient fort compétitives en pays accidenté.
Le M.A.G. (Motosacoche Acacias Genève) a pendant longtemps été le représentant de la technique du moteur semi-culbuté (échappement latéral avec admission avec culbuteurs). Monté dans cette Simplex de 1919 il est l'exemple de la place importante prise par l'industrie suisse chez tous les constructeurs européens (pilote Christ Haanen, NL).