Albert-Jean *
La machine présentée ci-dessus (son moteur à gauche) est vraisemblablement celle qui est citée dans le livre "1894 - 1914" pour sa participation au Critérium des Motocyclettes du 24 octobre 1901. Par la suite, vers 1905, les Ets Edouard Cheilus & Cie construisirent le Mototricycle Austral (moteur Aster) selon le "Système Albert Jean" précise un document publicitaire. Ce dernier donne également l'Historique du Mototricycle en ces termes :
"Le 'Mototricycle' a été créé en 1900 par M. Albert Jean, et les premiers appareils de ce système qui furent mis en circulation portaient cette marque, comme en témoigne la lettre suivante de M. Forestier, l'éminent Président de la Commission Technique de l'Automobile Club de France, datée du 31 mai 1902 :
Chez Edouard Cheilus (1905), le moteur est un Aster de 3 HP "à circulation d'eau par thermo-siphon et radiateurs". Un supplément de 150 F est demandé pour un moteur Aster de 4 HP. Le changement de vitesse est soit un Bozier épicycloïdal qui se met en marche par toupie (Type A sans pédales), soit un Rivierre dans le moyeu arrière (Type B avec pédales). La transmission finale se fait par une courroie sur la poulie-jante arrière. Le prix de la machine nue est de 1500 F, sans la caisse de livraison (+ 100 F) ou le siège passager (+ 100 F).
En 1906, Tourisme ou Livraison ont le même moteur Aster 4 HP (80 mm d'alésage x 90 de course), toujours à refroidissement par eau. Changement de vitesse Bozier sur les deux modèles et une chaîne finale remplace la courroie de 1905. Freinage par deux rubans métalliques garnis de cuir s'enroulant sur un tambour fixé au moyeu de la roue arrière, leur commande s'effectue par les pieds, les mains restant libres pour manœuvrer les autres manettes. Avec coffre de livraison ou "baquet grand luxe garni cuir", le prix de la machine est de 1800 F. Le pilote peut bénéficier d'une selle-fauteuil contre 50 F de supplément.
L'aventure Austral n'est pas simple et se poursuit de façon cahotique. En 1908, les Ets Habert & Cie, 29, avenue de la Grande-Armée , Paris XVIe, proposent une "Motocyclette légère Austral - Licence Rochet-Bruneau" sur un prospectus à en-tête de "Tricars Austral - Voiturettes - Motocyclettes - Bicyclettes - Pneumatiques - Accessoires. Usine à Albert (Somme)". Cette machine de 1 HP 1/2 (64 mm d'alésage x 68, soit 220 cm3) est baptisée en toute simplicité "La Reine des Reines". Sa chaîne finale sous carter en fait une moto "dont on peut se servir même en costume de ville, sans crainte de salir ses vêtements".
Nouveau rebondissement en 1912 lorsque les "Cycles et Automobiles Austral" passent sous la direction de J. Bernadou-Dacier, 12, rue Lamartine à Paris IXe. Nouvelle adresse en 1913 : Ateliers et Bureaux au 84, avenue Émile-Zola, Paris XVe. Il n'est alors plus fait mention des usines à Albert.
Mais le "feuilleton" reprendra après la guerre...
Alcyon *
Le 14 janvier 1912, au Palais des Sports s'affrontaient les coureurs Moreau et Collin pour la détention du "Brassard Persan" mis en jeu par le fabricant de pneumatiques Persan. Si l'on en juge par son bras droit, c'est l'homme de droite qui a été le vainqueur (reste cependant à savoir qui est qui ?). Par contre, aucun doute sur leurs machines qui sont toutes les deux des Alcyon en dépit des inscriptions que portent leurs maillots.
Si le moteur de ces machines est de série car on le trouve sur la 250 "Moto légère" de 1912 (62 mm x 82), leur transmission par chaîne avec démultiplicateur est plus rare. Elle ne figure qu'une fois sur une 250 bicylindre verticale du catalogue 1912. Elle sera surtout utilisée sur une autre 250 à 4 soupapes de circuit présentée au pesage du Grand Prix de France au Mans (1912) et sans doute au Tourist Trophy, exceptionnelle participation d'une moto française dans la célèbre compétition.
Autre rareté ci-dessous, une Alcyon équipée d'un moteur Buchet avec des soupapes dites commandées, c'est à dire "latérales" mais placées ici devant le cylindre. D'après le catalogue de 1905, le seul où elle figure, cette machine de 3 HP 1/2 était une 640 cm3, cylindrée obtenue par ses cotes-moteur de 95 mm d'alésage pour 90 de course (il y a de la coquille typographique dans l'air ?), soit un moteur "super-carré" inhabituel pour l'époque, c'est le moins qu'on puisse dire !
Une seule mauvaise photo dans Moto Revue montre le moteur 4 soupapes Zürcher de l'Alcyon de course 1912 et il faudra attendre les années 30 pour que ce dessin - toujours dans Moto Revue - en explique clairement la disposition.
En 1914, Labor une des marques-sœurs d'Alcyon, présenta cette Moto Légère (250 cm3) munie d'une curieuse fourche avant : le T de fourche coulisse dans la colonne de direction et le mouvement est limité par deux ressorts de part et d'autre du T. Sans suite par ailleurs, une technique similaire figurera au début des années 20 sur une "Moto Légère" chez Monet-Goyon.
Là, on est après-guerre au Parc des Princes où vient de se terminer l'épreuve de la Grande Ceinture 1920, un circuit de régularité autour de Paris. L'équipe Alcyon composée de Louis (pseudonyme de Ludovic feuillet), Jolly et Vulliamy (de gauche à dr.) vient de remporter la victoire dans sa catégorie. La demoiselle à droite ci-dessus montée sur un side-car Sunbeam est Yvonne Degraine, nageuse déjà célèbre en 1913 pour avoir remporté le Championnat féminin de grand fond (disputé dans les eaux de la Seine...).
Le même trio des pilotes officiels Alcyon à l'issue de la Course de Côte d'Argenteuil 1920 dont ils ont raflé les premières places en 250 (à droite, Julien Vulliamy), en 350 (Louis, à gauche) et aussi en 500 (Georges Jolly avec la bicylindre en V).
Banale au premier coup d'œil, cette carte-photo a l'avantage de représenter une Alcyon peu courante et qui ne restera pas longtemps au catalogue (1922-1924). Il s'agit d'une 250 à moteur deux-temps Ballot. Outre sa conception en bloc-moteur intégrant la magnéto, ses deux vitesses et sa transmission finale par chaîne il a deux particularités qui semblent uniques dans l'histoire mondiale de la moto. 1/ Le repose-pied wagon au pied droit fait fonction de kick. 2/ Le changement de vitesses s'effectue par... les genoux mais, bien que présent sur le modèle de 1919, lors du Salon de Paris, ce système ne sera pas conservé en série. Ci-dessous trois photos du prototype du moteur non-finalisé puisqu'il conserve une transmission par poulie.
Tout le bas-moteur est en alliage léger ainsi que les repose-pieds "wagon", d'où une fragilité certaine. Les rares exemplaires ayant survécu portent des traces de soudures ou présentent des réparations de fortune. La fourche du changement de vitesses enserre le réservoir et le genou du pilote presse l'une ou l'autre des branches pour enclencher l'une ou l'autre vitesse. Le haut d'une ancre marine qu'on aperçoit sur le carter est là pour rappeler que la spécialité des Ets Ballot était la construction de moteurs de bateaux.
Relevé, le repose-pied droit est sur la position "mise en route" en appuyant vigoureusement sur son extrémité gauche. Très sophistiquée et de fabrication onéreuse, cette technique marquait cependant un progrès par rapport à la concurrence qui ne connaissait guère le classique kick-starter. L'embiellage se retire par la trappe que ferme le couvercle nervuré en croix. De même, la magnéto est accessible par l'ouverture située en bas à gauche. Le choix de la chaîne finale n'était pas encore fait et la poulie-moteur fera place à un pignon sur la version définitive. La gestation a pris du temps car, apparue au Salon de 1919, la "Motocyclette Légère 3 HP" mettra un certain temps (comme le canon de 75) avant de figurer au catalogue Alcyon. Et elle ne devait pas être facile à vendre : 3300 F en 1921, puis 3600 en 1922 elle retombe à 3250 en 1923...
La tige devant le cylindre commande le décompresseur, elle était probablement couplée avec le "kick".
América
Ets A. Rogalle & Cie, 123 rue de Reuilly à Paris (Successeurs des Ets Ricbourg, fondés en 1855 : "La plus importante Maison de machines à Coudre de France").
Motocyclettes de 2 HP 1/2, 3 HP 1/2 et 4 HP 1/2 à moteurs Quentin (soupape automatique). Allumage par pile et bobine. Prix de 725 F à 1050 F. Supplément de 50 F pour fourche élastique Lithos.
"Cette machine, bien conduite, peut faire facilement du 65 km pour la 3 1/2 HP et du 80 km pour la 4 1/2, à l'heure en palier. Elle se recommande par sa simplicité et son confortable pour la conduite, tous les organes étant facilement accessibles et réglables pendant la marche. Elle présente le maximum de commodité et de simplicité ; ceci combiné avec une grande puissance et une extrême souplesse".
Au catalogue, la fourche avant rigide est de règle chez la majorité des constructeurs, ce qui laisse le champ libre à quantité de petits artisans qui proposent leur solution avec plus ou moins de sérieux mais beaucoup d'inventivité. Les grandes marques comme Peugeot, Terrot, Magnat-Debon résoudront cette question avec leurs propres productions. Les fourches Vigneaux ou Surleau qui font appel à des ressorts à lames séduiront Griffon ou Alcyon tandis que la Lithos plus économique peut tenter l'amateur. Malgré la présence de ressorts compensateurs faisant fonction d'amortisseurs, la Lithos pour petite (à gauche) ou grosse moto (à droite) n'inspirent qu'une confiance limitée